« Déconfinement » : entre joie et frustration

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Déconfinement

Le 3 mai dernier, le Ministère du Travail publiait son Protocole national de déconfinement pour les entreprises, en complément des 48 guides métiers déjà mis à disposition par les différentes fédérations professionnelles. Chaque branche s’est depuis saisie de cet outil pour adapter ces préconisations aux métiers et aux spécificités des terrains professionnels. La branche du Conseil n’est naturellement pas en reste, et nous nous efforçons depuis maintenant 3 semaines d’envisager la reprise de nos activités dans nos locaux.

Une reprise progressive 

Soucieux de respecter autant que possible les recommandations sanitaires, nous maintenons le télétravail de notre équipe à 100% jusqu’à fin mai, et une rotation des plannings des collaborateurs sera établie pour un retour au bureau à partir du mois de juin. Le besoin se fait sentir d’une reprise rapide et les missions ouvertes ces derniers jours concernent des recrutements urgents, suspendus un temps mais toujours indispensables. L’objectif de ce retour au bureau n’est toutefois pas de retrouver le même rythme qu’avant, en systématisant les entretiens en présentiel. Il s’agit d’abord de donner la possibilité aux candidats « shortlistés », arrivés en fin de process, de valider les étapes franchies jusque-là et de pouvoir rencontrer le client.

Les entretiens en visio seront donc maintenus dans une très large proportion afin de limiter les déplacements. Les entretiens de fin de processus et chez les clients sont quant à eux possibles en présentiel, car ils sont nécessaires pour valider la poursuite du process ou la finalisation d’un recrutement. Des mesures sanitaires sont naturellement mises en place pour reprendre le chemin du bureau et accueillir les candidats dans les meilleures conditions.*

« Cette reprise a quand-même un goût d’entre-deux assez désagréable », explique Mathieu. « On maintient le télétravail parce qu’on sait que c’est la règle et qu’on le peut, mais c’est très inconfortable parce qu’il faut jongler entre des contraintes familiales toujours réelles, les contraintes organisationnelles d’un retour au bureau en fonction des possibilités de chacun et les contraintes des clients, qui reviennent vers nous avec de réelles attentes et des plannings tout aussi compliqués. On est naturellement très heureux de voir l’activité du cabinet se poursuivre, mais on ressent un sentiment d’urgence dans les échanges avec nos clients, en plus d’un contexte global qui reste très anxiogène. »

« Nous pensons que la réponse est forcément à trouver dans l’humain », ajoute Julien, « et c’est pourquoi on ne peut pas repousser indéfiniment le retour au bureau. Les collaborateurs ont besoin de se retrouver, de recréer du collectif et de reprendre un rythme pro-perso sans la frustration d’être à moitié partout. On l’a vu très vite entre associés : on a avancé sur énormément de sujets de fond durant ces semaines de confinement en s’appelant plusieurs fois par jour, mais il a fallu qu’on se retrouve en face-à-face pour mettre un point final à ces échanges et pour pouvoir se dire qu’on avait traité les sujets ». « Par ailleurs, même si c’est en demi-équipe et en décalé, pour beaucoup la perspective de revenir sur le lieu de travail est un vrai bol d’air après ces longues semaines de confinement en famille ! », renchérit Mathieu.

Des limites finalement pas si virtuelles

Si notre processus de recrutement est en grande partie digitalisé et si nous avons les moyens de poursuivre notre activité à distance, soyons réalistes :  on ne recrute pas son futur DAF sur la base d’un entretien Skype. On recrute non seulement des profils mais aussi une personnalité, et l’entretien en visio nous prive d’un certain nombre de signaux non-verbaux mais néanmoins essentiels à l’évaluation d’un candidat (la posture, le regard, les réactions en situation…). Mais, en attendant de pouvoir organiser des entretiens en chair et en os, et parce que le virtuel reste encore la règle, il faut bien avancer !

Certains de nos collaborateurs ont ainsi exploré cet étonnant paradoxe de pouvoir entrer dans l’intimité des candidats, mais de ne pas parvenir à cerner leur personnalité, leur relief. « La visio ne sied pas à tout le monde ! C’est d’autant plus frustrant quand on sent que la personne correspond au profil recherché et pourrait révéler tout son potentiel lors d’un entretien physique. Dans ces cas-là, au moment d’organiser l’entretien virtuel avec le client pour valider la poursuite du process, on se demande si c’est vraiment souhaitable pour le candidat ou s’il ne vaudrait pas mieux attendre… », ajoute Aude.

Dans ces cas-là, on mise tout sur les quelques conseils qu’on peut donner à nos shortlistés : préparez ces entretiens virtuels comme n’importe quel entretien professionnel, testez votre matériel et les différentes plateformes de visio proposées. Si les conditions de l’échange ne sont pas optimales, si votre chat vous saute sur les genoux ou si votre machine à laver passe en cycle essorage, c’est l’occasion de dédramatiser un peu l’échange, et de révéler cette part de vous-même qui vient compléter votre CV. C’est d’ailleurs là le second paradoxe révélé par cette crise sanitaire : les rapports sont moins protocolaires, plus libres, et donc souvent plus directs. Quelque part, l’éloignement créé plus de proximité.

On en appelle aussi à la souplesse (et à l’agilité) de nos clients ! Le tout digital n’est pas la panacée pour tout le monde, et on en a vu certains refuser un premier échange virtuel avec les candidats simplement parce que ce n’est pas dans leurs habitudes. C’est peut-être l’occasion de revoir des processus ancrés et de revisiter notre rôle de Conseil aussi, en invitant les uns et les autres à innover et en proposant des alternatives ! Beaucoup ont ainsi découvert le télétravail, qu’ils envisagent de pérenniser alors qu’il faisait l’objet de beaucoup de méfiance jusqu’à récemment, et l’entreprise est amenée à changer sur bien des sujets !

Un temps de réflexion

Cette crise sanitaire aura eu le mérite de clarifier certains aspects inhérents à l’activité du recrutement. D’abord, elle aura été le révélateur de certaines compétences, des Soft Skills dont on ne peut plus faire l’économie aujourd’hui sur des postes clés : la capacité à réagir, la tolérance à la pression dans des contextes tendus, la résilience, la capacité d’innovation… Ensuite elle aura permis de donner aux candidats la capacité de trancher quant à leurs réelles aspirations professionnelles ! Projet de mobilité reporté ou changement de vie pour une quête profonde de sens : quelle qu’en soit l’issue, ce fut l’occasion pour certains de prendre le temps de l’introspection. Le recrutement des cadres semble y avoir gagné en transparence !

L’activité s’est ralentie durant le confinement, ce qui nous a permis de nous concentrer sur un axe de conseil qui nous tient vraiment à cœur. Ainsi, même si les outils existent et même si nous sommes en capacité de les exploiter pleinement, nous n’avons pas vocation à dématérialiser tout notre processus de recrutement. La crise sanitaire a démultiplié la durée et le nombre des échanges téléphoniques et visuels pour palier à d’impossibles rencontres, mais elle révèle surtout qu’on ne peut pas se passer de l’entretien, de l’échange*. A nous d’apprendre à lire à travers le masque !

Pour finir, nous avons nous aussi mis à profit cette période pour faire une petite introspection et questionner nos ambitions pour Humanae. Un travail de fond mené en équipe, qui a permis de dessiner les orientations d’Humanae 2021+ et que nous nous attelons à formaliser… On vous en dit plus très vite !

*Evidemment, on ne sacrifiera pas la santé de nos collaborateurs et de nos candidats pour organiser ces entretiens ! Masques, gel hydroalcoolique, distanciation, mesures d’hygiène, aménagement des horaires : tout est mis en œuvre pour limiter les rencontres et garantir la sécurité de tous !

Emeline M.

Photo source : Unsplash.com

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