Interview du 21 avril 2021 réalisée par Julien ROBILLARD.
Séverine MAISONNEUVE est la Directrice générale de VILLA MAÏA, hôtel de luxe 5* situé sur les hauteurs de Lyon et appartenant au Groupe MAÏA HOSPITALITY. Titulaire d’une maîtrise de Langue et Civilisation Etrangère, et plus particulièrement spécialisée sur Oscar Wilde, elle met en avant un très beau parcours au sein d’institutions locales telles que le SOFITEL LYON BELLECOUR ou ONLY LYON (Tourisme et Congrès). Séverine a rejoint le Groupe MAÏA en 2011 en tant que Chargée de Mission à la Direction Générale avant d’être nommée, en 2016, à la Direction de l’Hôtel VILLA MAÏA, en prévision de son ouverture (mars 2017). Eternelle passionnée d’Oscar Wilde, qui l’aide à entretenir un peu de légèreté dans un quotidien intense, Séverine revient sur une année hors norme et nous parle d’avenir.
Le secteur de l’hôtellerie restauration est décrit comme sinistré après cette année de crise, comment VILLA MAÏA a-t-il traversé 2020 ? Comment se portent vos équipes ?
Séverine MAISONNEUVE : Au total, nous avons fermé l’hôtel pendant presque 5 mois (du 15 mars au 26 juin, puis de début novembre au 17 décembre). Les équipes vont assez bien dans l’ensemble. Nous avons proposé des Ruptures Conventionnelles à quelques salariés au moment de la fermeture et, depuis la réouverture, nous avons légèrement repensé l’organisation. Nous nous sommes recentrés sur le noyau fort. Je veille chaque jour au (bon) moral des équipes… Cela me demande une très grosse énergie, notamment auprès des Managers, mais le résultat est là : nous avons réussi à bien gérer les équipes, à les préserver autant que possible, même si ça parfois été au détriment des Managers, qui sont assez fatigués. On a profité de cette période pour refaire notre site internet, digitaliser certains process et essayer de découvrir comment exploiter l’hôtel autrement ! On a notamment imaginé utiliser les suites pour des réunions de travail… ça a été des moments d’intense réflexion sur des solutions nouvelles, avec le souci d’impliquer les équipes.
Etes-vous parvenus à maintenir une activité durant l’été ?
Séverine MAISONNEUVE : Nous avons très bien travaillé durant l’été ! La population avait envie de sortir, et notamment les Lyonnais qui ont un immense besoin de (re)découvrir leur ville. Nous avons également eu quelques touristes français de passage à Lyon, sur la route du Sud.
Quelles sont les mesures qui ont été mises en place ?
Séverine MAISONNEUVE : Nous nous sommes engagés dans une démarche Qualité et avons fait appel à BUREAU VERITAS pour obtenir la « Charte Sérénité », qui impose que l’établissement s’engage à suivre le protocole sanitaire validé par BUREAU VERITAS. Cela impliquait naturellement la mise en place de procédures dans les chambres, la piscine, les espaces communs et l’installation de distributeurs de gel hydro. En définitive, nous ne l’avons pas vécu comme une contrainte parce que c’était l’occasion de repenser notre fonctionnement et de rassurer les équipes. Certaines de ces solutions seront d’ailleurs pérennisées, car nos métiers sont de toute façon soumis aux normes en matière d’hygiène et de sécurité. Pourquoi ne pas maintenir le port du masque en cas de maladie, comme cela se pratique dans les pays asiatiques ? Des leçons seront sans doute à retenir…
Avez-vous pris d’autres initiatives inédites dans le contexte actuel ?
Séverine MAISONNEUVE : Nous avons repensé notre offre et davantage travaillé sur l’accueil de la clientèle extérieure (les séminaires professionnels, par exemple). Le service commercial a effectué beaucoup moins de déplacements (moins de Salons, notamment), donc la communication se fait différemment. Cela fait partie des choses qui resteront. Nous avons privilégié le digital, avec d’importantes campagnes sur les réseaux sociaux. Dans une petite structure comme la nôtre, cela a modifié notre vision du commercial en profondeur. Le digital crée une proximité intéressante, cela nous rend plus accessible.
La clientèle étrangère a-t-elle totalement déserté le sol français ? Vers quelle clientèle vous tournez-vous aujourd’hui ?
Séverine MAISONNEUVE : Il n’y a eu aucun client étranger cet été, ou alors un peu en provenance de Suisse et du Luxembourg. La région Rhône Alpes représente près de 50% des clients aujourd’hui ! Et nous avons aussi accueilli une clientèle plus familiale et plus locale, des gens qui recherchaient un peu d’évasion pour rompre avec le quotidien.
Quels sont, pour vous, les enjeux majeurs du monde de l’hôtellerie et du tourisme actuellement ?
Séverine MAISONNEUVE : Il est très difficile de se projeter parce qu’il est presque impossible d’anticiper l’évolution des comportements. Je pense quand même que les « Petites maisons » vont tirer leur épingle du jeu car il y a un vrai besoin de se retrouver chez les gens. On en revient aux fondamentaux de nos métiers : accueillir et recréer de l’intimité, du lien au sein d’une communauté. La polyvalence sera encore plus nécessaire.
Nous allons par ailleurs devoir affronter une difficulté majeure : le désintérêt des jeunes pour les métiers de l’hôtellerie/restauration, qui était déjà perceptible avant la crise sanitaire, mais qui est encore plus marqué aujourd’hui. Pourtant, rares sont les métiers dans lesquels on peut commencer en bas de l’échelle et évoluer vers la Direction générale d’un établissement, sans formation spécifique.
Et, pour vous offrir ma vision d’ensemble, il faut bien aussi que je mentionne les enjeux financiers liés au secteur, qui sont tout bonnement colossaux. Avec le recul, je me dis que cette « année COVID » aurait peut-être dû être consacrée à la révision de la convention collective, pour la faire évoluer et rendre nos métiers plus attractifs ! Ce chantier reste à venir…
Quels défis s’annoncent chez MAÏA pour 2021 ?
Séverine MAISONNEUVE : Nous organisons la réunion des 3 marques et la mise en place de l’offre du Groupe MAÏA HOSPITALITY. Il s’agit de mutualiser les marques HOTEL VILLA MAÏA 5*, les marques de cosmétique (VALCENA PARIS, AÏAM MAÏA, BELLE DE MAÏA) et le domaine viticole CHATEAU DE LA CHAIZE sous la bannière MAÏA HOSPITALITY. Cela nous promet de beaux projets de Communication !
Mais, surtout (et en ce qui me concerne de près !), il faut que l’Hôtel VILLA MAÏA arrive à un équilibre financier pérenne.